"Sans ma barbe, quelle barbe !"

Je me permets donc de paraphraser le barde barbu de mon enfance. Avec ses bouclettes au menton, Corbier ne soulevait pas a priori l'ardeur de la gente féminine. « Baiser sans barbe, omelette sans sel », dit pourtant le proverbe. Ici, en Asie, la barbe n'est pas un apparat courant. Et lorsqu'on l'associe à une peau laiteuse et un nez aquilin, l'Autre ne reste pas indifférent.

Les « boulè », « pharang », « phalang » ou pour d'autres encore « barang » (autrement dit nous, les Occidentaux) intriguent. Le blanc, plus encore quand il arbore un beau collier velu, attire les regards. Celui des femmes d'abord. Quel que soit leur âge, en Indonésie, en Malaisie ou au Laos, elles n'hésitent pas à m'interpeller, se caressant les joues avec un grand sourire et un pouce levé. Apparemment, je suis au poil.

Les hommes aussi n'y sont pas indifférents, en tout bien tout honneur. Les mêmes gestes, avec une pointe de jalousie dans le fond de l’œil pour certains. Et oui, nous ne sommes pas tous égaux face à cette pilosité faciale. Nous n'avons d'ailleurs rencontré que très peu de barbus le long des routes d'Asie. Quelques moustachus, et encore... Et si, à de rares occasions, une personne avoue ne pas aimer la barbe, elle prend bien soin de me gratifier d'un « mais pour vous, c'est différent » ou d'un « mais vous, ça vous va bien ». Ouf, on était à un cheveu de l'incident diplomatique !

Nico.